Le PDG de Saab se montre clair: la décision de son entreprise de s'implanter au Canada dépendra de la décision d'Ottawa d'acheter ou non ses avions Gripen.
«Transférer la technologie et construire un centre dans un pays qui n'utiliserait pas lui-même les avions et n'aurait pas de lien avec l'utilisateur final n'a pas vraiment de sens», a fait valoir Micael Johansson à La Presse Canadienne.
Il a ajouté que les avions sont conçus pour être continuellement mis à niveau à mesure que la technologie évolue.
Saab a proposé la création d'un centre de production au Canada qui, selon la société suédoise, pourrait créer environ 10 000 emplois dans ce pays.
«Nous aimerions beaucoup le faire, et cela soutiendrait le marché mondial si nous le faisions», a-t-il ajouté.
Saab possède des chaînes de production en Suède et au Brésil, mais cherche à augmenter sa capacité afin de pouvoir répondre à un afflux de commandes potentielles, notamment en provenance d'Ukraine. L'entreprise envisage également de s'implanter ailleurs en Europe, par exemple au Portugal.
M. Johansson a insisté sur le fait que l'entreprise ne menait pas campagne au Canada et ne cherchait pas à conclure une vente.
«Nous répondons simplement aux questions sur ce que cela signifierait pour le Canada s'il décidait finalement d'opter pour une flotte mixte », a-t-il assuré.
Saab faisait partie des nombreuses entreprises suédoises représentées dans la délégation lors d'une visite royale très médiatisée au Canada cette semaine.
Le roi Carl XVI Gustaf et la reine Silvia de Suède ont rencontré le premier ministre Mark Carney et les deux pays ont signé un partenariat stratégique visant à approfondir leurs liens et leur coopération en tant que voisins de l'Arctique et alliés de l'OTAN.
La proposition de construire un centre de production au Canada n'est pas nouvelle. Saab avait fait la même offre dans le cadre de son appel d'offres officiel pour vendre au Canada des chasseurs Gripen en remplacement de sa flotte vieillissante de CF-18.
Elle a perdu ce contrat au profit de la société américaine Lockheed Martin en 2023.
Les commentaires de M. Johansson cette semaine interviennent alors que le gouvernement fédéral réexamine l'accord visant à acheter jusqu'à 88 chasseurs furtifs F-35 au constructeur américain, compte tenu de la guerre commerciale avec les États-Unis.
La ministre de l'Industrie, Mélanie Joly, a indiqué mardi aux journalistes que le Canada ne tirait pas suffisamment d'avantages industriels de cet accord et a lancé l'idée de passer à une flotte mixte.
Ottawa s'est engagé à acheter 16 F-35 jusqu'à présent.
L'ambassadeur des États-Unis au Canada, Pete Hoekstra, a déclaré cette semaine lors d'une conférence sur l'industrie manufacturière à Ottawa que le F-35 était un «succès phénoménal» et a vanté la participation de l'industrie canadienne à sa production, le qualifiant d'«avion international».
Il a également évoqué l'accord sur les avions de combat en réponse à une question sur la renégociation de l'accord commercial entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Le diplomate a affirmé que les États-Unis attendaient de voir ce que le gouvernement canadien ferait «sur un certain nombre de ces questions».
«C'est un excellent exemple de bonne coordination, mais vous savez, le Canada procède actuellement à un examen de son industrie de la défense», a affirmé M. Hoekstra mercredi.
«Nous devons savoir ce que signifie la construction d'une infrastructure de défense canadienne (...) certains diront peut-être que vous n'en avez pas vraiment», a-t-il lancé, ajoutant que de nombreuses entreprises canadiennes du secteur de la défense sont des filiales d'entreprises américaines.
La ministre Joly s'est exprimée jeudi lors d'un événement aux côtés de son homologue suédoise, la ministre de l'Industrie Ebba Busch, qui participait également à la visite royale. Mélanie Joly a déclaré que, bien que le Canada soit très intéressé par Saab, Ottawa avait besoin de plus de détails sur la proposition.
Micael Johansson a déclaré qu'il faudrait entre trois et cinq ans pour mettre en place un centre de production canadien et que «cela permettrait de créer 9000 à 10 000 emplois», directs et indirects, «de manière continue pendant des décennies».


