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De l'aide canadienne parachutée à Gaza après l'assouplissement des restrictions

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«La faim d'origine humaine ne peut être combattue que par la volonté politique.»

De l'aide canadienne parachutée à Gaza après l'assouplissement des restrictions De l'aide canadienne est parachutée sur la bande de Gaza un jour après qu'Ottawa eut annoncé son intention de reconnaître l'État palestinien

De l'aide canadienne est parachutée sur la bande de Gaza un jour après qu'Ottawa eut annoncé son intention de reconnaître l'État palestinien, une décision qui a suscité à la fois des éloges et des condamnations au Moyen-Orient.

Israël a légèrement assoupli ses restrictions draconiennes sur l'acheminement de nourriture et de médicaments vers le territoire palestinien, en réponse au tollé international suscité par la famine dans l'enclave.

Après que des centaines de personnes ont été tuées par balle dans des sites d'aide gérés par Israël, Ottawa et des organismes de bienfaisance canadiens ont exhorté l'État hébreu à autoriser l'entrée de camions d'aide dans la bande de Gaza pour des distributions par l'intermédiaire des Nations Unies.

La ministre des Affaires étrangères, Anita Anand, a indiqué, dans une publication sur X, que la Jordanie participait au parachutage de l'aide canadienne et a publié une photo de palettes à bord d'un avion, sur lesquelles étaient collés des drapeaux canadiens.

Toutefois, les experts en aide humanitaire avertissent que les parachutages d'aide sont beaucoup moins efficaces que les convois de camions. Certaines palettes parachutées sont tombées à la mer, et au moins une a frappé et tué des Palestiniens au sol.

«Les parachutages n'inverseront pas la famine qui s'aggrave. Ils sont coûteux, inefficaces et peuvent même tuer des civils affamés», a écrit Philippe Lazzarini, directeur de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), sur les réseaux sociaux.

«La faim d'origine humaine ne peut être combattue que par la volonté politique. Levez le siège, ouvrez les portes et garantissez la sécurité des déplacements.»

Le premier ministre Mark Carney a invoqué mercredi les restrictions d'aide imposées par Israël et la nécessité de préserver la voie vers une solution à deux États pour justifier sa déclaration selon laquelle le Canada reconnaîtrait officiellement l'État de Palestine.

Cette décision est conditionnelle à la mise en œuvre de réformes sérieuses par l'Autorité palestinienne et à la tenue d'élections l'année prochaine, pour la première fois en deux décennies.

Avant cette semaine, Ottawa avait laissé entendre que cette reconnaissance interviendrait à l'issue des pourparlers de paix entre les dirigeants palestiniens et israéliens.

Au cours de l’automne dernier, le gouvernement fédéral a laissé entendre qu’il pourrait reconnaître l’État palestinien plus tôt en raison de l’expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie et du nombre élevé de morts à Gaza. M. Carney a évoqué ces deux préoccupations dans son annonce de mercredi.

L'annonce du premier ministre a été saluée par les gouvernements d'Arabie saoudite, de Jordanie et du Qatar, ainsi que par les défenseurs canadiens des Palestiniens. 

Le gouvernement israélien a condamné cette décision, tandis que les organisations juives au Canada ont affirmé qu'elle compromettrait les négociations de cessez-le-feu et encouragerait de nouvelles violences.

Un pas de plus

Thomas Juneau, professeur en affaires internationales à l'Université d'Ottawa, a estimé que M. Carney faisait un pas dans la bonne direction vers la paix au Moyen-Orient en tentant de légitimer un gouvernement palestinien afin qu'il puisse contrer le Hamas.

L'Autorité palestinienne contrôle actuellement de vastes zones de la Cisjordanie par l'intermédiaire du parti Fatah. Le Hamas, que le Canada considère comme un groupe terroriste, contrôle entièrement Gaza.

Israël revendique le contrôle des deux territoires depuis 1967. Le Canada et d'autres États considèrent que cette occupation est illégale.

Aucun des deux territoires n'a tenu d'élections depuis 2006, et les sondages du groupe de réflexion anticorruption Aman Coalition ont révélé des inquiétudes généralisées concernant la corruption au sein des deux gouvernements palestiniens.

Selon M. Juneau, il est «contre-productif» de suggérer que l'Autorité palestinienne est trop défaillante pour être réformée, d'autant plus qu'il n'existe aucune solution de rechange crédible.

«Les mots ne vaincront pas le Hamas, a-t-il affirmé. L'un des moyens d'y parvenir est de renforcer l'Autorité palestinienne face au Hamas.»

M. Carney a indiqué mercredi que le Canada devait agir pour préserver la voie vers une solution à deux États, et que les démarches des alliés en faveur d'un État palestinien offraient «la possibilité d'influencer» la situation.

M. Juneau a souligné que le premier ministre avait été clair quant à l'influence limitée du Canada sur la situation au Moyen-Orient.

«Ce n'est pas une révolution. Cela ne change absolument pas la donne, a-t-il expliqué. Si les pays autres que les États-Unis veulent avoir un impact marginal, mais réel, ils doivent agir de manière concertée.»

Il a ajouté que les libéraux ont probablement pris en compte la réaction politique des communautés juive et musulmane pour décider de leur réponse aux événements au Moyen-Orient, y compris l'impact de l'inaction du Canada.

Il se peut que M. Carney prenne des décisions de politique étrangère en accordant moins d'importance à la politique intérieure que ses prédécesseurs, a relevé M. Juneau.

«Bien sûr, les considérations de politique intérieure ont compté; il serait absurde de prétendre le contraire. Mais peut-être moins que par le passé», a rappelé le professeur.

Les conservateurs ont soutenu que le Canada encourageait le Hamas, tandis que le NPD estime qu'Ottawa doit aller plus loin et restreindre le commerce et les ventes d'armes à Israël.

M. Carney n'a pas donné de réponse immédiate lorsqu'on lui a demandé s'il entendait imposer des restrictions sur le commerce avec Israël.

Dylan Robertson

Dylan Robertson

Journaliste